Autoroutes électriques : Faut-il investir dans LA véritable révolution des transports?
Le 5 juin 2024
La mobilité électrique est en plein essor et se présente comme une solution prometteuse pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Cependant, l’autonomie limitée des batteries et le manque d’infrastructures de recharge rapide freinent encore son adoption à grande échelle.
C’est dans ce contexte que le concept d’autoroutes électriques apparaît comme une innovation majeure susceptible de révolutionner le transport routier et pourrait devenir une thématique d’investissement boursier à part entière. Décryptage 👇
1. Concept des autoroutes électriques et technologies dominantes
Les autoroutes électriques, également appelées « routes intelligentes » ou « routes électrifiées », ont pour objectif de fournir de l’électricité aux véhicules en mouvement, éliminant ainsi la contrainte d’une autonomie limitée des batteries. L’idée génialement simple est d’amener l’électricité aux véhicules et non l’inverse. Trois technologies principales (il en existe donc d’autres) sont envisagées pour concrétiser ce concept.
Les caténaires
D’ abord, les systèmes caténaires. Inspirés des trains électriques ou des tramways, ces systèmes se composent de lignes aériennes de contact qui fournissent de l’électricité aux véhicules par le biais d’un pantographe. Cette technologie permet une recharge en mouvement, mais elle est moins adaptée aux véhicules légers comme les voitures.
Les circuits conductifs
Ensuite, le circuit conductif intégré dans la chaussée. Inspirée des circuits électriques de notre enfance, cette technologie propose d’intégrer des conducteurs électriques directement dans ou sur la chaussée de l’autoroute. Ces conducteurs, constitués de matériaux comme le cuivre ou le graphite, forment un réseau continu sous ou sur la surface de la route. Les véhicules électriques équipés de patins ou de brosses conducteurs pourraient alors capter l’électricité en roulant sur la chaussée, rechargeant ainsi leur batterie, tout en roulant.
L’induction
Enfin, la recharge par induction. Des bobines de câblage installées sous la chaussée de l’autoroute génèrent un champ magnétique alternatif (ni plus ni moins le système qui fait chauffer vos poêles à travers la vitrocéramique de votre cuisinière). Les véhicules électriques équipés de récepteurs compatibles captent l’énergie et rechargent leur batterie en roulant. Cette technologie offre un avantage déterminant face au 2 premières: aucun contact entre le véhicule et sa source d’alimentation: le rêve! Ou plutôt un début de réalité, puisque c’est déjà effectif pour les places de parking.
Comme vous l’avez compris, avec les caténaires, le conductif ou l’induction, le bénéfice pour les utilisateurs est absolument énorme. Évidemment, on s’intéresse.

2. Avantages des autoroutes électriques
Comme vous l’avez compris, les autoroutes électriques présentent de nombreux avantages.
Réduction des gaz à effet de serre
Le tout premier est bien évidemment la réduction des émissions de gaz à effet de serre. En annonçant, la mort du moteur thermique, l’UE a provoqué une émulation sans précédent dans le monde industriel et du transport. Les autoroutes électriques contribueront à réduire considérablement les émissions de CO2 et de polluants atmosphériques de manière beaucoup plus structurelle que d’autres solutions. Le mot important de ce paragraphe étant le mot “structurelle”. Déterminant, n’est ce pas?
Une autonomie illimitée
Le second argument, certainement le plus important, est le graal de l’électrique: l’autonomie illimitée des véhicules. La recharge en mouvement permettra aux véhicules électriques de parcourir de longues distances sans contrainte d’autonomie, favorisant ainsi leur adoption à grande échelle. Admettez que là, il y a une réelle disruption d’usage avec les autres propositions. Déterminant, là aussi!
Des temps de trajet enfin raisonnables
Le troisième, conséquence du second, est la diminution du temps de trajet. En éliminant les arrêts pour recharger les batteries, les autoroutes électriques permettront de réduire les temps de trajet mais aussi la pénibilité des opérations. Mais, qu’y a t’il de passionnant à poireauter pendant 2 heures sur un parking de station essence au fin fonds de la Picardie?
Avec ce concept, l’électrique devient facile et peu contraignant. Et vous savez quoi? Toute les grandes innovations gagnantes de l’histoire industrielle ont un point commun: la simplification d’un usage… On ne doit pas en être loin ici. Encore déterminant n’est-ce pas?
Moins de poids embarqué
Le quatrième et dernier des arguments pour ces technologies est une réduction conséquente du poids des véhicules et notamment des voitures. Et c’est bien la batterie elle-même qui permettra ce gain substantiel. Elle ne servira qu’à terminer les tous derniers mètres d’un long trajet. Oui, j’exagère un peu, mais l’idée est là. Jancovici est formel, le poids des véhicules sera déterminant dans cette transition énergétique. DÉ-TER-MI-NANT !

3. Autoroutes électriques, il reste du chemin à parcourir
Mais la perfection n’étant pas de ce monde, les autoroutes électriques présentent certains inconvénients qui doivent tout de même nous interpeller. Le chemin est balisé, certes. Mais la route est encore longue.
Des ressources suffisantes pour les autoroutes électriques?
Tout d’abord, la première des questions concerne la construction même d’autoroutes électriques qui implique des investissements importants dans l’installation de câbles, de caténaires ou d’autres équipements de recharge sous la surface, au-dessus de la route ou en aérien. Se pose clairement la question des ressources alors que l’on sait déjà que certains matériaux seront en tension dans les années à venir. Mais à toute révolution, n’apparaît-il pas de nouvelles solutions surprenantes? On trouvera.
Une adoption continentale des autoroutes électriques
Ensuite, il s’agira d’orchestrer une adoption généralisée des autoroutes électriques. On sait déjà qu’en France, pas tradition séculaire, ce sera plus difficile qu’ailleurs. Question de principe! diront les uns. Quels emmerdeurs! diront les autres. Mais il faut bien admettre que l’idée ne fonctionnera que si on la généralise au continent, rien que ça. Surtout pour les véhicules légers. Pour les camions, c’est différent. l’industrie sait et saura optimiser les principes de la « navette routière » (Seule la marchandise va loin, les hommes, eux, se relayent!). Vaste débat à n’en pas douter en tout cas. Mais, ça vaut le coup d’une longue diatribe populaire.
Un coût financier collectif et individuel
Par ailleurs, il faudra équiper les véhicules électriques de technologies de recharge par induction ou par caténaire pour pouvoir utiliser les autoroutes électriques. Cette mutation nécessitera donc des investissements supplémentaires pour les consommateurs. Évidemment que l’on sait faire pour accompagner la transition. Mais la question de la soutenabilité financière du projet continental viendra rapidement perturber les enthousiastes . Qui veut, peut! me direz vous. On pourra.
Des choix sans pollution visuelle
Autre sujet de préoccupation, les équipements de recharge aériens auront un impact visuel sur le paysage et nos rues, ce qui soulève des questions d’esthétique et d’acceptabilité pour les populations. On a beau faire des efforts d’esthétique pour nos trams urbains actuels, ça reste “visiblement” “voyable” quand même. Surtout à l’heure de l’enfouissement des lignes électriques, téléphoniques et consorts. Imaginez le casse-tête à l’échelle de l’Europe entière. Les caténaires et autres pantographes seront utilisés, sans nul doute, avec parcimonie.
Une adaptation des moyens de production électrique
Et puis, enfin, quid de l’augmentation de la demande en électricité due à ces autoroutes électriques? Cette rupture structurelle dans les modes de transport nécessitera une mise à niveau du réseau électrique et de sa production. Un défi majeur et supplémentaire, à n’en pas douter. Devra-t-on un jour accepter la décroissance et la restriction énergétique? Rien n’est moins sûr. Mais la question est posée.

4. La Suède en locomotive
Mais en attendant la victoire des sceptiques, les enthousiastes agissent. Et finalement, c’est certainement en Suède qu’est la clé des choix de demain. En ce moment même, un projet pilote révolutionnaire transforme 20 kilomètres de l’autoroute E20 en une voie électrifiée, une première mondiale.
Trois technologies (celles décrites plus haut) s’y affrontent pour devenir la norme de demain : induction, caténaires et conducteurs. L’objectif ? 3 000 kilomètres d’autoroutes électriques d’ici 2045, dessinant le futur des transports durables. Stockholm se place, ainsi, à l’avant-garde. Ses choix influenceront le monde entier.
Déterminer le système le plus adapté pour atteindre cet ambitieux objectif. Voilà pourquoi les scandinaves poursuivent leurs recherches! Bref, l’avenir est là-bas, sur l’E20. Surveillons ce projet de près car il déterminera, sans nul doute, nos choix d’investissement pour l’avenir de nos autoroutes, sur l’ensemble du continent, voire même plus. Mais ne nous arrêtons pas là, il existe d’autres initiatives tout aussi intéressantes voire intrigantes.

5. Les industriels et des start-up se positionnent pour des systèmes d’autoroute électrique
En effet, des industriels se positionnent un peu partout. Encore actuellement, le paysage des technologies d’autoroutes électrifiées s’enrichit avec l’arrivée de nouveaux acteurs. Certains sont surprenants, mais d’autres y voient une simple extension de leur savoir faire.
Voici un panorama des entreprises qui développent activement des solutions pour électrifier les transports routiers. La plupart sont cotées sur différentes places financières de la planète. Pour rappel, ces noms ne sont en aucun cas des conseils d’achat ou vente mais simplement des pistes de réflexion si une ou plusieurs de ces technologies venaient à l’emporter:
- SIEMENS: Autoroute électrifiée par caténaire (projet eHighway).
- SCANIA: Technologie de caténaires pour camions, tests en Suède.
- QUALCOMM: Technologie d’induction (Halo) en partenariat avec Renault et Nissan.
- VOLVO: Caténaires pour camions (projet en collaboration avec Elonroad).
- ALSTOM: Système APS pour tramways.
- EASELINK: Système par induction appelée « Matrix Charging » en partenariat avec le constructeur automobile chinois SAIC.
- BOMBARDIER: système caténaire pour les tramways avec le projet « Primove ».
- TOSA: Technologie d’autoroute électrifiée par pantographe pour les bus électriques (tests effectués à Genève).
- ELECTREON WIRELESS: Technologie d’induction, projets pilotes en Israël.
- DYNAMIC ELECTRIC ROAD SYSTEMS: Technologie par induction par segments routiers (en alternatif) récemment testée sur une route publique en Suède.
- FURRER + FREY: projets d’autoroutes électrifiées pour les camions et les bus avec des systèmes de caténaire.
- CONDUCTIX-WAMPFLER: projets d’autoroutes électrifiées pour les tramways et les bus en milieu urbain via des caténaires.
- ENGIE: Technologie par induction appelée « Road Power » récemment testée en Belgique.
- BAE SYSTEMS: Système par caténaire pour les camions électriques en partenariat avec la start-up américaine PLUG POWER.
- CATL: Système par induction pour les véhicules électriques, projet pilote en Chine.
- COLAS et SOLAROAD : Intégration de cellules photovoltaïques dans la chaussée.

Comme vous le voyez, ça foisonne de partout. Il n’est pas à douter que certains seront les gagnants de demain… ELECTREON étant peut-être l’entreprise la plus intrigante de ce panel. Il est important de rappeler que cette liste n’est pas exhaustive et que d’autres acteurs peuvent entrer à tout moment dans ce domaine en pleine évolution.
6. La France parmi les pionniers des autoroutes électriques
Mais la France n’est pas en reste. Elle est même dans la course, aux avant-postes. Parmi d’autres initiatives, l’autoroute A10 entre Paris et Bordeaux sera au cœur d’une expérimentation majeure en matière d’électrification des transports routiers. Un projet pilote unique au monde.
VINCI Autoroutes, en collaboration avec plusieurs partenaires (et notamment ELECTREON) va en effet déployer deux technologies de recharge dynamique sur deux tronçons de 2 kilomètres chacun. D’un côté la recharge par induction avec des bobines intégrées sous la chaussée permettent de recharger les véhicules compatibles en roulant. D’un autre côté, la recharge par rail conductif (nos circuits électrique d’enfance): un rail fixé au sol alimentant les véhicules équipés d’un patin de contact.
Que le meilleur gagne, c’est pour la planète et aussi nos investissements futurs. J’adore!
Conclusion
Malgré des difficultés évidentes à résoudre, les autoroutes électriques présentent un potentiel considérable pour révolutionner le transport routier de manière durable. Les avantages en termes de réduction des émissions, d’amélioration de l’efficacité et d’extension de l’autonomie des véhicules électriques sont convaincants.
Pour cela, il faudra que la technologie continue d’évoluer et que les coûts diminuent. Mais n’est-ce pas le propre d’une révolution technique? C’est à ces conditions que les autoroutes électriques deviendront une réalité courante dans les années à venir, contribuant à un avenir plus propre et plus durable pour les transports. Certains industriels l’ont bien compris et se positionnent déjà avec entrain pour ne justement pas le rater… le train (électrique bien sûr)!